Cours sur la photo numérique

Cours de photographie (2005-2011)

Exercice 11 : reportage et documentaire

Le reportage est une des formes la plus courantes de notre consommation d’images photographiques. C’est un genre en soi, important historiquement. Le reportage est lié à la notion de document, mais il s’est souvent, à raison, détaché de la quête de l’objectivité pour devenir partisan, engagé, dénonciateur.

If your pictures aren’t good enough, you aren’ close enough
(si vos photos ne sont pas bonnes, c’est que vous n’êtes pas assez près).
Robert Capa

Contingence du photographe de presse

La photographie de reportage est liée à l’industrie de la presse, ce qui signifie que si vous voulez placer vos images, il sera important de travailler en symbiose avec elle : partir au Burundi quand tout le monde regarde l’Iran sera certes louable, mais risqué. Le travail du reporter est donc souvent fait d’une négociation entre intéret personnel, impératifs de l’actualité et orientation de l’organe (ou des organes) de presse auquel on s’attache.

Il y a bien sûr d’autres attitudes possibles, les "grands reporters" ont une plus grande marge de manoeuvre par exemple, et il est toujours possible de partir à l’encontre de toutes les tendances faire des reportages free-lance sur des sujes dits "personnels" ou "engagés". Mais c’est prendre le risque d’investir argent et temps sans espoir de publication, ce que peu de reporters peuvent se permettre.

Esthétique et information

Le reportage est largement dominé par des codes esthétique mis en place dans les grandes agences internationales d’après-guerre. Lisibilité de l’image, composition simple orientée sur l’impact visuel, sujet en connection directe avec le sujet général du reportage, usage de la focale courte (nous parlons ici du reportage d’actualité, distinct du reportage sportif et de la presse people, dominés par d’autres codes).

Approche du sujet, déontologie et moralité

Le comportement du reporter lors de son travail dépend fortement de sa psychologie mais le reporter a pour vocation d’aller à la recherche d’une information, parfois inaccessible, cachée, occultée, rare, dangereuse parfois. Le respect de l’autre peut se conjuguer avec cet impératif de métier, mais les conditions réelles (le manque de temps surtout) rend ce métier intrusif, parfois grossier. La proximité nécessaire à arracher l’information et le détail pousse le photographe de reportage à entrer physiquement dans l’espace de l’autre, à en forcer l’intimité. Pour ce faire, un arsenal de justification a été fourbi depuis les débuts du reportage, allant d’un désir de vérité au cynisme du métier. La plupart du temps, une bonne dose d’indifférence due à l’expérience suffit. Les photographes de presse se comparent eux-mêmes souvent à des mercenaires.

Des personnes comme Walker Evans, Edward Curtis, Bernd et Hilla Becher, essaie d’étendre la notion d’événement, d’informations, ce qui produit des images parfois nettement différentes.

L’exercice

Produire 10 à 20 images autour d’un événement ou d’une situation, qui implique en partie au moins des personnes et des lieux inconnus de vous. Le but est de se confronter à un monde extérieur sans en avoir tous les repères. Cette confrontation est importante, et si elle n’a pas lieu, l’exercice sera considéré comme raté.

OU

Produire au moins 2 reportages de 10 images sur des événements "one shot", c’est à dire des événements limités dans le temps.

Produisez des images aptes à rendre intelligible cette situation, éventuellement accompagnée de 4 lignes de texte. Le contexte du reportage sera de toutes façons demandé lors du débriefing.

Ne partez pas avec quelque chose de trop précis en tête en terme de concept ou de mise en situation. Le reportage est un art de l’improvisation, de la mobilité, de l’attente, de l’intuition. Nourissez l’ensemble d’images produites par des vues "non événementielles". Des détails, natures mortes, paysages, peuvent donner une vision plus distanciée, plus élargie, de l’événement choisi.

Les images doivent être construites pour donner un impact visuel fort, qui va faire de chaque image une entité, une image, avec un impact visuel et/ou émotionnel. Le travail plus que jamais articule des images fortes pour en faire une série cohérente.

Un conseil
Couvrez un événement ou un sujet avec au moins une soixantaine de photographie. Le numérique permet la générosité en nombre de vue sans que ça ne coûte autre chose que votre temps. De là , dégagez une série, de 10 à 15 images, qui soient cohérentes. Cohérent ne veut pas dire semblable, la diversité des point de vues physique sont en accord avec une "vision" de votre sujet. Au final, on doit pouvoir dégager votre point de vue sur le sujet traité.

Par stephane, 29 mars 2010